Une nouvelle génération de tests moléculaires de dépistage du COVID-19

 
04/06/2020

Une équipe de l’ESPCI Paris - PSL travaille depuis plusieurs semaines avec le soutien de la ville de Paris pour mettre au point un test de terrain rapide et fiable au COVID 19. Le système, appelé COVIDISC, s’appuie sur un test microfluidique mis au point par l’équipe de Patrick Tabeling au Laboratoire Chimie Biologie Innovation (ESPCI / CNRS), déjà testé sur différentes maladies infectieuses comme le Zika ou encore la dengue, et adapté pour le COVID-19 avec une très bonne sensibilité et spécificité. C’est une nouvelle génération de tests moléculaires, qui mobilise les technologies les plus récentes, alors que les tests actuels s’appuient sur une technologie (PCR) vieille de 37 ans. Le dispositif permet de réaliser des tests fiables en moins d’une heure, avec un appareillage simple, portable et peu coûteux, se conservant à température ambiante, qui pourrait être produit à grande échelle.

Lisa Dehove

Depuis 2014, l’équipe de Patrick Tabeling collabore avec l’Institut Pasteur à la mise au point d’un test de diagnostic par biologie moléculaire qui exploite la capillarité dans les canaux de bandes de papier pour détecter de l’ARN viral, c’est-à-dire l’empreinte génétique spécifique d’un virus, dans des échantillons cliniques (sang, salive...). Avec le soutien de la Ville de Paris pour accélérer la recherche en levant les obstacles administratifs et en apportant des moyens financiers, l’équipe (composée de Patrick Tabeling, Etienne Coz, Pierre Garneret et Elian Martin, alliant physique, biologie, ingénierie), décide d’adapter son système à la détection du COVID- 19 dès le mois de février. Chaque virus possède dans son génome des régions qui lui sont spécifiques. Définir un jeu d’amorces qui détecte une de ces régions du pathogène pour l’amplifier permet d’identifier spécifiquement le pathogène en rendant visibles les produits de l’amplification. Mentionnons enfin l’aide de DNA Script, qui a synthétisé en un temps record des molécules cruciales pour faire des premiers tests. « Les résultats des expériences que nous avons menées avec l’Institut Pasteur sont très encourageants », souligne Patrick Tabeling. Avec la formidable action de Pierre, Etienne, et Elian, nous sommes parvenus à détecter des quantités très faibles de charge virale, proches de celles détectées en PCR. Par ailleurs, le test s’avère spécifique, c’est-à-dire qu’il permet d’identifier spécifiquement le COVID-19, et pas d’autres variantes de coronavirus notamment. »

Un système ingénieux adapté au diagnostic

Le dispositif mis au point par l’équipe fonctionne en deux étapes : la première consiste à extraire l’ARN du virus sur une membrane (à partir d’un prélèvement de salive ou d’un prélèvement nasal), puis à amplifier le matériel génétique à température constante (méthode LAMP) sur une pastille prétraitée, pour ensuite détecter les produits d’amplification.
Le caractère isotherme de la réaction est crucial, puisqu’il permet d’avoir une partie instrumentale, pour le diagnostic, beaucoup plus simple et moins coûteuse que les équipements PCR, la méthode de référence.
« La clé de l’invention réside dans le couplage entre une excellente gestion des fluides, permise par la microfluidique, et l’utilisation de la LAMP, inventée vingt ans après la PCR, ce qui donne un système beaucoup plus adapté au diagnostic simplifié » confie Patrick Tabeling. En effet, le système est entièrement portable, et une analyse dure environ une heure, même si l’équipe essaie également d’optimiser les différentes étapes pour réduire encore ce temps.

Lisa Dehove

Une industrialisation en ligne de mire

Le service de valorisation de l’Université PSL accompagne le projet pour permettre sa future commercialisation. Les chercheurs, appuyés par la Ville de Paris, et les autorités sont d’ores et déjà en contact avec un industriel pour envisager une production à plus grande échelle de ces COVIDISC, tout en optimisant le système d’analyse et de lecture. La ville de Paris a passé commande de prototypes dès le 3 avril, avant même que les tests scientifiques soient concluants, pour gagner du temps dans la phase d’industrialisation. Avant de pouvoir étendre le dispositif à une utilisation dans les cabinets médicaux, EHPAD ou petits laboratoires, l’équipe pourrait utiliser ce test dans quelques sites pilotes, afin d’identifier les améliorations éventuelles à apporter à l’utilisation du dispositif. La ville de Paris a signé un contrat avec un industriel pour financer les 1000 premiers tests.

Financements publics

Le projet COVIDISC a été soutenu par le Fonds ESPCI Paris, la Fondation Bettencourt le dispositif ANR Flash COVID-19 et par une bourse du DIM ELICIT, le programme de la Région Île-de-France soutenant le développement de technologies pour les sciences de la vie.

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