Des nanoparticules stoppent les fissures dans les biogels

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28/10/2019

L’utilisation d’hydrogels – matériaux mous fortement hydratés – est aujourd’hui envisagée pour le développement de technologies émergentes comme la robotique molle, la réparation tissulaire ou encore l’électronique souple.
Pourtant certains processus sont encore peu connus d’un point de vue fondamental dans ces matériaux dits « fragiles » ; c’est notamment le cas de la propagation des fissures. Des chercheurs de l’INSP (Sorbonne Université / CRNS) et du laboratoire SIMM (ESPCI Paris – PSL – CNRS – Sorbonne Université) viennent de démontrer qu’il était possible d’utiliser des solutions de nanoparticules pour ralentir la propagation de fissures dans des biogels, voire même pour les arrêter. Ces travaux ont été publiés et ont faits la Une de la revue Physical Review Letters.

Une fissure se propage dans un biogel (gel de gélatine, coloré en beige). En déposant une goutte de solution de nanoparticules (colorée en vert) de silice sur le front de fissuration, la fissure est ralentie, voire stoppée.

Il y a quelques années, les chercheurs du SIMM et du laboratoire MMC (aujourd’hui C3M) ont mis au point une nouvelle méthode de collage dédiée aux gels et aux tissus biologiques basée sur des nanoparticules (NPs).
Avec des chercheurs de l’INSP, le concept est cette fois étendu à la propagation de fissure dans des gels de gélatine (biogels). Les scientifiques sont parvenus à montrer qu’il était possible de ralentir voire même d’arrêter la propagation de fissure en déposant quelques gouttes de solutions de NPs en fond de fissure. Ce résultat pouvait sembler contre-intuitif puisque normalement l’ajout de solvant en pointe de fissure a tendance à accélérer la propagation de la fissure. En effet, le gel, fortement déformé en pointe de fissure, va pomper le solvant environnant et ceci va conduire à faciliter les conditions de fissuration. Mais, si l’on ajoute des nanoparticules au solvant (nanoparticules de silice, par exemple), on observe expérimentalement l’effet inverse : la fissure est ralentie, voire stoppée.

Les chercheurs ont montré que deux effets se cumulaient. D’abord, quelle que soit l’affinité des NPs pour le gel, les NPs viennent s’agréger en pointe de fissure pour former un caillot qui va assécher le front de la fissure et la propagation est ainsi ralentie. Dans le cas où les nanoparticules s’adsorbent, l’adhésion rapide des NPs sur les lèvres de la fissure va accroître la résistance à la propagation de la fissure, jusqu’à stopper la fissuration dans certaines conditions.
Ces travaux fondamentaux permettent de mieux comprendre les mécanismes de fissuration dans les gels, mais ouvrent des perspectives pour le développement de méthodes de réparation actives et ciblées pour les gels, puisque c’est le gel qui va guider les NPs de son environnement vers les zones les plus endommagées.

Publication associée :

DOI : 10.1103/PhysRevLett.123.158002

O. Ronsin et al., Environmental Nanoparticle-Induced Toughening and Pinning of a Growing Crack in a Biopolymer Hydrogel , Phys. Rev. Letters 123, 158002 (2019)

Contact chercheur :
alba.marcellan@espci.psl.eu





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