Pierre Curie, inventeur et chercheur de génie

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16/05/2022


Pierre Curie nait le 15 mai 1859 à Paris. Célèbre pour ses travaux de recherche sur la radioactivité et ses talents d’expérimentateur et de concepteur d’instruments, sa personnalité rêveuse ne le prédestinait pourtant pas à un tel avenir dans ce domaine. En 1903, il reçoit avec sa femme, Marie Sklodowska-Curie, le prix Nobel de Physique. Pour l’anniversaire de ce physicien et inventeur de génie, retour sur sa vie et ses inventions, intimement liées à l’histoire de l’école.

« Si j’avais le temps, je me laisserais bien aller à raconter toutes les rêvasseries que j’ai faites »

©Musée Curie (collection ACJC)
Jacques (gauche), Pierre (droite) et leurs parents en 1878
Pierre Curie grandit dans une famille de la petite bourgeoisie peu fortunée. Il a un grand frère, Jacques, dont il est très proche et qui deviendra également physicien. Leur mère se nomme Sophie-Claire Depouilly et leur père, Eugène Curie est un médecin passionné de sciences qui aurait aimé faire de la recherche.
Enfant timide et contemplatif, Pierre Curie avec un fonctionnement qui n’était guère académique, comme le confie sa femme Marie dans son livre Pierre Curie : « Les qualités intellectuelles de Pierre n’étaient point de celles qui permettent d’assimiler rapidement un programme d’études scolaires. Son esprit rêveur ne se soumettait pas à la réglementation de l’effort intellectuel imposée par l’école. La difficulté qu’il éprouvait à suivre ce régime était généralement attribué à une certaine lenteur de l’esprit. Lui-même se croyait d’intelligence lente et il lui arrivait fréquemment de le dire. »

L’enseignement n’étant alors pas obligatoire, ses parents assurent eux même son instruction. Par la suite, un ami de la famille, Alexandre Bazille prend le relai et lui enseigne les mathématiques élémentaires et spéciales. Cela développe les capacités mentales de Pierre Curie, qui se révèle avoir des aptitudes remarquables dans ce domaine. Il est également très porté vers les sciences naturelles et s’intéresse particulièrement à la faune et la flore qui l’entourent.

Pierre Curie aime la nature, et il se balade souvent avec son frère, Jacques Curie, dont il est très proche. Dans les pages d’un journal écrit en 1870, il affirme : « Si j’avais le temps, je me laisserais bien aller à raconter toutes les rêvasseries que j’ai faites. Je voudrais aussi décrire ma délicieuse vallée, toute embaumée de plantes aromatiques, le beau fouillis si frais et si humide que traversait la Bièvre, le palais des fées aux colonnades de houblon, les collines rocailleuses et rouges de bruyère sur lesquelles on était si bien. »

L’invention du quartz-piézoélectrique

Pour Pierre Curie, c’est un besoin d’approfondir et de comprendre les phénomènes naturels afin d’établir par la suite une théorie satisfaisante. Cependant, à son époque, les données scientifiques quantitatives sont rares. Il existe très peu d’instruments de mesure ce qui rend difficile l’étude pratique des phénomènes. Une partie moins connue des travaux du physicien est donc portée sur la conception d’instruments scientifiques.

En 1880, Pierre Curie et son frère Jacques, alors âgés respectivement de 21 et 25 ans, découvrent le phénomène de piézoélectricité. C’est la propriété de certains cristaux, dont fait partie le quartz, d’émettre des petites quantités d’électricité lorsqu’ils sont comprimés ou étirés le long d’axes de symétrie particuliers. De cette découverte découle une invention nommée quartz piézoélectrique, un instrument de mesure des faibles charges électriques.

Plus tard, cet appareil sera utilisé pour les travaux de Pierre et Marie Curie sur la radioactivité en leur permettant de mesurer, à l’œil nu et avec précision, la quantité de rayonnements émis par les sels d’uranium. Ils découvriront ainsi le radium (à partir de la pechblende) et le polonium. Par ailleurs, lors de la Première Guerre Mondiale, Paul Langevin et ses collaborateurs utiliseront les propriétés de l’effet piézoélectrique, afin de développer le sonar.

Pierre Curie et l’ESPCI

Fin 1882, la collaboration entre les deux frères s’interrompt. Jacques Curie est nommé professeur de minéralogie à l’Université de Montpellier, tandis que Pierre Curie devient préparateur à l’Ecole Municipale de Physique et Chimie Industrielles de la ville de Paris, tout juste créée ! (EMPCI, à savoir notre école aujourd’hui, l’ESPCI). Il devient ensuite chef de travaux et le restera pendant 12 ans. Il met au point différents instruments, dont une balance apériodique à plateau, afin d’exécuter des pesées de grande précision et rapidement.
A partir de 1891, le physicien effectue une longue série de recherches sur le magnétisme qu’il présentera comme thèse de doctorat à la Faculté des Sciences de Paris en 1895. Il explique son travail de cette manière : « Les corps se divisent au point de vue de leurs propriétés magnétiques en trois groupes distincts : les corps diamagnétiques, les corps faiblement magnétiques, les corps ferro-magnétiques. A première vue, ces trois groupes sont absolument tranchés. Le but principal de ce travail était de rechercher s’il existe des transitions entre ces trois états de la matière, et s’il est possible de faire passer progressivement un même corps par ces trois états. »


Gauche : Pierre Curie Droite : L'expérience de mesure permettant d suivre l'évolution de l'aimantation d'un matériau en fonction de la température.

Dans cette étude, Pierre Curie utilise un électroaimant pour mesurer la température à laquelle un matériau perd son aimantation, appelée température de Curie (ou point de Curie). L’expérience, faite à l’ESPCI, a été reconstituée par Bernard Pigelet, restaurateur d’instruments. Elle est toujours accessible dans l’école et une démonstration de son fonctionnement est disponible :

En 1895, année de son mariage avec Marie Sklodowska, Pierre Curie est nommé à un nouveau poste de professeur à l’ESPCI. Il est chargé de la partie théorique du cours d’électricité et magnétisme. En parallèle, il aide sa femme avec ses recherches menant à la découverte de la radioactivité et il met au point d’autres appareils de mesure. Afin de mesurer l’électricité produite par le passage des rayons radioactifs dans l’air, il conçoit par exemple un électromètre à quadrants.

Prix Nobel et consécration

En 1900 il est nommé comme chargé de cours complémentaires de physique à la faculté des sciences de l’université de Paris. Par la suite, le prix Nobel propulse sa carrière et une nouvelle Chaire de physique générale est créée à la Sorbonne pour lui en 1904. L’année suivante, Pierre Curie se présente à l’Académie des Sciences, et en est élu membre le 3 juillet 1905. En parallèle il est responsable du laboratoire et de l’organisation de l’enseignement de physique de l’ESPCI de 1882, à sa mort en 1906. Dans ses dernières années, lors d’une conférence à la Sorbonne, Pierre Curie confiera : « Les professeurs de l’Ecole de physique et de chimie, les élèves qui en sortent, constituent un milieu bienfaisant et productif, qui m’a été très utile. C’est parmi les anciens élèves de l’Ecole que nous avons trouvé nos collaborateurs et nos amis. Je suis heureux de pouvoir, ici, les remercier tous. »

CRH ESPCI Paris - PSL Gustave Bémont (gauche), Pierre Curie (centre) et Marie Skłodowska-Curie (droite) dans leur laboratoire à l'ESPCI vers 1903

Pour aller plus loin :
https://musee.curie.fr/decouvrir/la-famille-curie/biographie-de-pierre-curie
« Pierre Curie », Marie Curie, éditions Odile Jacob, 1996




ÉCOLE SUPÉRIEURE DE PHYSIQUE ET DE CHIMIE INDUSTRIELLES DE LA VILLE DE PARIS
10 Rue Vauquelin, 75005 Paris